dimanche 24 avril 2011

Tout le monde s'en fout...

J'avais dit que j'en avais terminé avec les photos de cerisiers, mais je dois faire un dernier petit article pour rendre hommage à un genre de cerisiers bien particulier.


Les "yae zakura", qui parce qu'elles sont trop belles et trop voyantes, n'ont pas réussi à trouver leur place dans le coeur des Japonais.

"Yae"  signifie littéralement "huit feuilles". En fait les yaezakura n'ont pas nécessairement huit feuilles, mais c'est le terme généralement employé pour désigner les fleurs de cerisiers possédant plus de cinq feuilles.

Je ne sais pas si vous avez eu l'oeil suffisament observateur pour remarquer ça sur les photos précédentes, mais les fleurs de cerisier comme les aiment les Japonais comportent normalement cinq feuilles.

Le motif de la fleur de cerisier à cinq feuilles est utilisé un peu partout et jusque sur les bouches d'égout.

Pourquoi se limiter à cinq feuilles, alors que plus il y a de pétales plus c'est joli?

Ca c'est tout le mystère de l'esthétique japonaise. Il faut que ça soit beau, mais que ça reste relativement simple et discret. Huit feuilles et plus, c'est beaucoup trop tape-à-l'oeil. Ca fait vraiment le cerisier bling bling qui dit "Moi, moi, moi, moi!". Alors que pour les Japonais, toute la beauté du cerisier réside surtout dans son côté fragile et éphémère. Juste cinq petites pétales, qui ne sont là que pour quelque temps avant de s'envoler au moindre coup de vent...

Comme nous n'avons pas en France l'obsession des cerisiers à cinq pétales, il me semble que la plupart des cerisiers que nous pouvons voir par chez nous sont ces "Yaezakura" que les Japonais aiment tant à bouder.

Les cerisiers bling bling résistent mieux, et arborent fièrement leurs fleurs pendant très longtemps. Mais du coup ils n'intéressent personne. 
Cette esthétique de la simplicité, c'est quelque chose que l'on retrouve partout dans l'art et dans la culture du Japon. A Kyoto par exemple, il y a le Kinkakuji ( pavillon d'or) et le Ginkakuji ( pavillon d'argent).

Le pavillon d'or :


Le pavillon d'argent :

Si le pavillon d'or semble pouvoir mériter à peu près son nom, on ne peut pas en dire autant du pavillon d'argent... En fait le pavillon d'argent devait à origine être recouvert d'argent, mais les travaux n'ont jamais pu aboutir car la guerre a éclaté à ce moment là. Finalement, même une fois la situation rétablie, ils ont trouvé que le pavillon d'argent était pas mal non plus comme ça, et rien n'a été fait pour reprendre les travaux là où ils avaient été interrompus.

C'est donc de très peu que le pavillon d'argent a échappé au bling bling. Beaucoup de Japonais considèrent que par sa simplicité et par son raffinement, il est plus élégant que le pavillon d'or. Je vous laisse vous faire votre propre avis là-dessus...

Pour en revenir à nos cerisiers, même si les yaezakura ont eu l'outrecuidance de ne pas respecter les règles de l'esthétique japonaise, ils restent très beaux quand même. Je devais donc consacrer un petit article à ces oubliés.

3 commentaires:

  1. Je ne m'étais encore jamais amusé à compter les pétales des cerisiers ! Ils sont fous ces japonais !

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  2. Saki (et pas Sakiko)26 avril 2011 à 23:51

    bien exprimé Lucas!
    et oui c le nombre de pétales comme tu dis (et non on compte pas chaque fois ), ms c aussi le couleur. le rose sur les cerisiers communs comme Someiyoshino sont plus pâles que celui sur les Yaés. Et on aime bien l'impression de la modesté ça donne.

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  3. Merci pour ces explications. Encore un trait de culture qui prend tout son sens gràce à toi.

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